L’installation d’un rucher à la Clinique s’inscrit dans une démarche scientifique et pédagogique.
Elle vient principalement d’une passion commune pour les abeilles partagée par le Dr Desmarez, apiculteur chevronné et vétérinaire associé
et le Dr Bertrand, apiculteur et vétérinaire titulaire du DIE apiculture – pathologie apicole.
Notre rucher remplira une fonction pédagogique. Il permettra à tout intéressé d’apprendre à connaitre le monde fascinant des abeilles
et de leur élevage. Les salariés de la clinique seront donc appelés à manipuler les abeilles, à reconnaitre les différents composants d’une colonie d’abeille, à déceler les premiers signes cliniques, etc.
Nous sensibiliserons également lors de conférences et de manipulations pratiques notre clientèle à l’élevage des abeilles et à leur sauvegarde.
Avril 2020
C’est le printemps pour nos abeilles ! Et il démarre particulièrement tôt cette année. Le travail au rucher en ce début de saison apicole consiste à évaluer l’aspect sanitaire des colonies. Nous cherchons alors rigoureusement des signes de maladies éventuelles et, fort heureusement, nous ne constatons rien d’anormal sur notre rucher lors de cette visite sanitaire de printemps. Nous évaluons également la force des colonies en estimant la quantité d’abeilles et l’état des réserves nutritives. Nous vérifions également si les reines ont bien démarré la ponte. La présence d’un beau couvain régulier signe la présence d’une reine efficace et en bonne santé, ce qui est de bon augure pour la suite !
Photo d'un cadre prise lors de la dernière visite
Le couvain est d’abord dit « ouvert », les œufs puis les larves sont accessibles par les ouvrières qui les nourrissent de gelée royale les trois premiers jours puis de gelée nourricière. Ensuite, passé un certain stade de développement, la larve envoie des signaux olfactifs et chimiques aux ouvrières qui « operculent » les alvéoles. Elles les ferment donc d’une fine couche de cire, enfermant les larves en leur sein. Nous sommes maintenant au stade de couvain dit « fermé » ou « operculé ». Il ne reste plus que quelques jours de développement aux larves pour devenir des nymphes puis des abeilles matures. Les abeilles prêtes à naitre grignotent leur opercule et sortent de l’alvéole. En bonnes ménagères, les jeunes abeilles commencent leur vie dans la colonie en nettoyant leur alvéole pour faire place nette et permettre à la reine de venir pondre à nouveau dans leur cellule enfin libérée.
Au rucher, nous avons donc transvasé un essaim de l’année dernière d’une ruchette (contenant 5 cadres) à une ruche (dont la capacité atteint 10 cadres). Elle acquiert donc la place nécessaire à son bon développement. D’autres ruches qui avaient été hivernées sur 5 cadres se sont vues rajouter des cadres pour passer à 7 cadres. Nous augmentons donc au cas par cas le volume des colonies en fonction de leur « force » et de leur vitesse de développement. Rajouter trop de cadres d’un coup reviendrait à augmenter trop rapidement le volume de la colonie. Ce grand volume est plus difficile à chauffer et nos abeilles perdraient de l’énergie inutilement.
Dans l’environnement direct de notre rucher, une belle couleur jaune envahit l’espace : le colza est en fleurs dans les champs.
Quand les températures seront au rendez-vous, il apportera une quantité de nectar très importante pour nos abeilles. Nous serons alors en plein dans « la miellée de printemps ». Il est bientôt temps pour nous de poser sur les corps de ruche de nouveaux éléments : les hausses. Il s’agit de structures en bois ressemblant très fortement aux corps de ruche mais dont la hauteur est divisée par deux. Ce sont dans celles-ci que nos abeilles vont stocker le nectar récolté dans l’environnement. Nous empilerons les hausses les unes sur les autres à mesure que les abeilles les rempliront de nectar puis de miel et accompagnerons à nouveau nos colonies au cas par cas. Ce nectar est récolté par l’abeille, mélangé à quelques enzymes digestives et stocké dans les alvéoles de cire des cadres contenus dans la hausse. L’abeille va alors entamer une étape extrêmement importante dans la fabrication du miel : le séchage (ou « déshydratation »). Les abeilles vont en effet se relayer jour et nuit pour ventiler le nectar (elles utilisent leurs ailes pour créer des « courants d’air » à proximité du nectar) dans le but de le déshydrater. Elles jaugent ensuite régulièrement sa teneur en eau (l’humidité) du miel et quand elles le jugent assez « sec », il est temps pour elles de l’operculer. Elles rajoutent alors en surface de l’alvéole une fine couche de cire pour la fermer complètement. Ainsi séché et à l’abri, le miel peut se conserver plusieurs années. C’est le signal pour l’apiculteur que le miel est bon à récolter. Mais ça, ce sera l’objet du prochain chapitre!
Décembre 2019
Malgré les souffrances du mois de mai, nos colonies ont eu le temps de reconstituer leurs effectifs. Nous les avons alors bichonnées en prévision de l’hiver. A l’automne, après évaluation des réserves de miel (nous avons sous-pesé les ruches), certaines colonies ont été nourries (sirop de sucre (70%)). Toutes les colonies ont ensuite reçu un traitement contre le parasite Varroa. Des cadres ont aussi parfois été enlevés pour resserrer les colonies et diminuer au maximum le volume des ruches.
En effet, durant l’hiver, les abeilles forment une grappe dense pour se réchauffer, à l’image des manchots sur la banquise. Elles limitent ainsi au maximum la dépense de calories et, parallèlement, la consommation des réserves. Plus le volume à chauffer est petit, moins elles usent d’énergie. Pour elles, le miel accumulé pendant la belle saison est la seule source d’énergie disponible en attendant les beaux jours (et les floraisons qui accompagnent le début du printemps). Cet été, nous aurions pu leur prélever une partie du miel pour notre consommation mais nous avons décidé, au vu de leurs réserves de leur laisser l’intégralité de leur travail.
Durant l’hiver, les conditions météorologiques nous contraignent à ne pas ouvrir les ruches. Malgré la curiosité et l’envie, nous allons devoir prendre notre mal en patience en attendant le printemps !
Février 2019
Novembre 2018
Cette période pré-hivernale est critique pour nos colonies d’abeilles. Si les abeilles d’été ont une espérance de vie de 5 à 6 semaines tout au plus, celles d’hiver
doivent avoir la capacité de survivre jusqu’à 6 mois. Le froid de l’hiver provoquera chez la reine un arrêt de ponte et le redémarrage de la colonie au printemps sera assuré par les abeilles qui
auront survécu à l’hiver.
Inutile de préciser qu’elles doivent être en forme pour assurer la survie de la colonie ! La nature a tout prévu puisque morphologiquement, ces abeilles d’hiver sont en de nombreux points différentes des abeilles d’été. Notamment, elles sont dotées de véritables « corps gras » qui assureront un rôle de réserve nutritive et d’isolation durant les grands froids.
Plusieurs trouble-fêtes peuvent gâcher la bonne forme de ces abeilles d’hiver. En tout premier lieu : Varroa destructor.
Un petit acarien dont le nom laisse présager, à raison, le pire. Parmi les nombreux effets néfastes qu’il inflige à nos abeilles, il raccourcit drastiquement leur espérance de vie. Les abeilles infestées par varroa durant leur développement meurent plus rapidement durant l’hiver et puis c’est le cycle infernal. En effet, durant les grands froids, les abeilles se mettent en grappe (un peu à la manière des manchots sur la banquise) et se relaient de l’extrémité vers le centre de la grappe pour, tour à tour, réchauffer et se réchauffer au contact du groupe. Moins il y a d’abeilles, ou plus elles meurent vite, moins ce comportement collectif et vital est efficace.
Nous avons donc traité nos colonies d’abeilles en fin du mois d’août avec des bandelettes APIVAR (médicament vétérinaire luttant contre Varroa).
Nous les enlèverons après un temps d’application de 10 semaines.
Un autre nuisible s’est mêlé à la fête en cette fin d’été. Nous avons appris qu’un nid de frelons asiatiques avait été aperçu dans les quelques 200 m à la ronde autour de notre rucher et on a observé une pression de prédation très importante.
Les nombreux frelons volent autour de nos planches d’envol et attendent le moment opportun pour fondre sur nos abeilles. Une fois la victime attrapée, le frelon l’emmène à quelques mètres, la découpe pour n’en garder que les « bonnes » parties (le thorax et ses muscles alaires, riches en protéines) puis rejoint son nid.
Frelon asiatique : reconnaissable à
ses pattes jaunes et à sa couleur orangée. Ne pas confondre avec le frelon européen, insecte endémique historique de nos régions, dont les pattes sont noires.
Nos pièges placés à proximité du rucher ont été tout-au-plus très peu efficaces.
Espérons que nos jeunes reines assurent bien au chaud une ponte efficace et régulière pour que les abeilles d’hiver naissent en forme et en grand nombre.
Nous voilà de retour en cette fin septembre 2018. L’été a été marqué par de vives chaleurs et une sécheresse sans précédent qui se poursuit encore aujourd’hui. Les colonies semblent avoir passé le cap sans grandes difficultés. Nous les avons bien aidées puisque nos abeilles ont pu profiter d’abreuvoirs mis à leur disposition à proximité des ruches durant toute la période de canicule. Ceux-ci ont été confectionnés de sorte qu’elles puissent s’y abreuver sans se noyer.
Aucune récolte de miel n’a été opérée cette année afin de laisser aux abeilles les réserves nécessaires à leur survie hivernale.
Notre essaim artificiel n'a jamais démarré et un essaim naturel a malheureusement perdu sa reine sans explication. Cette dernière s’est donc retrouvée dans l’impossibilité de survivre et est devenue bourdonneuse.
Des cailloux et petits bouts de bois sont placés dans les abreuvoirs et servent de radeaux de fortune permettant aux abeilles de garder les pattes au sec
Qu’est-ce qu’une ruche dite « bourdonneuse » ?
Notre colonie, subitement retrouvée orpheline, est non-viable à moyen terme puisque seule la reine est capable de renouveler la population d’abeilles. En effet, la reine possède un petit organe appelé la spermathèque où elle renferme les spermatozoïdes de plusieurs mâles (ou faux-bourdons). Cette spermathèque est alimentée lors de l’unique « vol de fécondation » qu’effectue la reine après son éclosion.
Qu’est-ce qu’une spermathèque ?
Ce « sac » est muni d’un petit clapet, permettant à la reine de déposer sur l’œuf fraîchement pondu des spermatozoïdes (donnant alors des cellules diploïdes* et, in fine, des abeilles) ou de pondre un œuf simple si le clapet reste fermé (qui donnera naissance à un être formé de cellules haploïdes*, un mâle ou faux-bourdon).
Les abeilles n’ont qu’une seule solution si la colonie veut survivre : re-fabriquer une reine. Elles peuvent en élever une ou plusieurs à partir de couvain frais (œufs de 3 jours maximum) en nourrissant les éventuels œufs restants de la défunte reine. Elles nourrissent ces œufs uniquement de gelée royale et confectionnent une capsule de cire caractéristique autour de ceux-ci (ces cellules sont appelées « cellules royales »)
Fécondation de la reine lors du vol de fécondation.
Le vol de fécondation fait partie des comportements les plus impressionnants des abeilles. La reine, jeune éclose a effectué son vol de repérage autour de la colonie (elle repère entre-autres, la position du soleil par rapport à sa ruche) et s’apprête à partir pour son vol de fécondation. Elle vole parfois plusieurs kms et rejoint un lieu appelé « congrégation de mâles » où l’attendent quelques centaines de faux-bourdons qui tenteront tous de la féconder. Les heureux élus (une dizaine), mourront après la fécondation. On comprend à la lumière de cette pratique que si les abeilles d’une même colonie ont toutes la même mère (la reine), elles ont en revanche une dizaine de pères différents. Il en résulte un primordial brassage génétique et le mélange de caractéristiques génotypiques et phénotypiques qui l’accompagne.
Dans notre rucher, l’ajout d’un cadre de couvain frais venant du rucher personnel du Dr Desmarez, n’a malheureusement pas permis aux abeilles de donner naissance à une nouvelle reine. Celles-ci se sont mises à pondre des œufs elles-mêmes dans les alvéoles des cadres vides mais les abeilles n’étant pas dotées de spermathèque, leurs œufs donnent naissance obligatoirement à des mâles. C’est ainsi que si la population de cette colonie ne s’est pas effondrée, elle a vu disparaître les abeilles au profit des faux-bourdons qui sont incapables de survivre seuls. Le nom de ruche bourdonneuse vient de cette particularité : on y dénombre plus de mâles que de femelles. Nous considérons aujourd’hui que cette colonie est malheureusement morte et continuons la route avec nos 2 autres colonies en pleine forme.
Juin 2018 - Marquage de la reine de la 2ème colonie.
Nous avons pu constater la présence de ponte fraîche, de larves (couvain ouvert) et de quelques cellules operculées.
Les constructions de cire ont bien commencé: la moitié des cadres sont construits.
Nous avons également pu observer la reine et nous en avons profité pour la marquer avec une petite tache jaune sur le thorax (non pas en l'honneur du Tour de France
qui passera à Fougères cet été, mais car c'est un code qui repère son année de naissance)
La 1ère colonie n’est plus seule depuis le 29 mai 2018 puisqu’un essaim (naturel, cette fois) a agrandi notre rucher. L’essaimage naturel est le mode de reproduction des colonies d’abeilles. La colonie parente se divise naturellement en deux quand certaines conditions sont réunies (manque d’espace, abondance de ressources, météo favorable, etc) ; d’une part, la reine quitte la colonie accompagnée de la moitié des abeilles présentes. De l’autre, les abeilles restant dans la ruche, se sentent orphelines et élèvent à leur tour une nouvelle reine pour assurer l’avenir de la colonie.
L’essaim ainsi constitué se pose à proximité de la ruche d’origine, dans un arbre ou une cavité naturelle de fortune. Le temps nécessaire pour trouver un nouvel abri digne d’assurer la survie des abeilles. C’est à ce moment que l’apiculteur intervient et « cueille » l’essaim pour le replacer dans une nouvelle ruche. Cet essaim naturel est donc composé d’une grande quantité d’abeilles et d’une reine qui est prête à pondre. Sauf imprévu, il évoluera naturellement plus rapidement que notre premier essaim qui, pour rappel, attend de former sa future reine.
Ca y est ! Notre première colonie d’abeilles est arrivée le 11 mai 2018 sur notre site de Lécousse. Il s’agit d’un essaim artificiel créé par le Dr Desmarez. Il a réuni dans une ruche des abeilles issues d’une colonie forte de son propre rucher ainsi que des cadres de réserves (miel, nectar et pollen) et du couvain. Les abeilles ainsi réunies vont élever leur propre reine qui assurera la pérennité de cette nouvelle colonie dans les mois et années à venir. Nous surveillerons régulièrement, d’ici la seconde moitié du mois de juin, qu’une reine sera bien née et fécondée en vérifiant la présence de couvain.
Première visite de la ruche.
Anita, notre ASV, manipule le nourrisseur destiné à soutenir les abeilles dans les premiers jours suivant la création de notre essaim artificiel
Vue de haut de notre essaim artificiel. Les inter-cadres sont remplis d’abeilles appliquées à étirer les amorces de cire. Le numéro 18 correspond à l’année d’introduction des nouveaux cadres. Ce chiffre permettra de suivre le renouvellement des cires au fil des saisons apicoles.
Nuage d’abeilles devant notre essaim naturel enruché le 29/05/2018.
Des plantes mellifères (ici, de la centranthe rouge, appelé aussi lilas d'Espagne ou Valériane des jardins) ont été plantées aux abords directs de notre clinique. Les abeilles n’ont que quelques mètres à survoler pour y accéder !